La charge de grue

Grues par dizaines
Des grues par dizaines !

Aussi appelée « saturation de grue », la charge de grue n’a aucun rapport avec les capacités de levage. Il s’agit ici d’appréhender l’occupation de la grue.
Par charge de grue il faut donc entendre « charge de travail de la grue »… Et par saturation de grue, « charge de travail permettant de saturer la grue ».

Importance de la grue

La grue est l’organe le plus important du chantier. Elle est au chantier ce que le micro-processeur est à l’ordinateur : elle cadence le travail et distribue les matériaux et matériels. Plus de 80% des tâches quotidiennes du chantier nécessitent à un moment donné une manutention mécanique. L’avancement du chantier est donc directement lié au travail de ses grues.

Intérêts de la charge de grue

Lors du chiffrage de l’opération, votre entreprise émet des hypothèses :

  • nombre de grues,
  • amplitude journalière de travail des ouvriers,
  • amplitude journalière de travail des grutiers,
  • amplitude journalière de travail de l’encadrement,

Ces données ont toutes un lourd impact financier sur les « frais de chantier ».

Comment alors fiabiliser ces hypothèses ? Comment s’assurer qu’il y aura assez de grue sur le chantier ? Gue les grutiers ne feront pas trop d’heures supplémentaires… ?

C’est le rôle de la saturation de grue.

Fonctionnement

La charge de grue dépend de deux autres documents indispensables :

  • le métré opérationnel,
  • le planning,

Avec ces deux éléments, vous pourrez dégager des cadences de travail.

La charge de grue est égale au cumul des cadences journalières de travail multipliées par un temps unitaire de levage :

Charge de grue = CadenceVoiles * TUvoiles + CadencePlanchers * TUplanchers   etc…

Elle s’exprime en heures (h), ou de préférence en heures de grue (hG) afin de ne pas la confondre avec de la main d’œuvre.

Le choix des temps unitaires

Sujet de discorde. Comment mesurer les temps unitaires de grue ? Quel niveau de décomposition retenir ? Comment tenir compte des aléas ? Il y a autant de visions des choses qu’il y a d’entreprises de bâtiment. La seule règle à respecter est la suivante : votre temps unitaire (TU) de levage doit être facilement associable à des cadences de travail.

Exemple : vous exprimez vos cadences de plancher en m²/jour > votre temps unitaire de levage devra être exprimé en hG/m².

Concernant la provenance des temps unitaires, certaines entreprises mesurent avec un chronomètre le temps de travail de la grue pour chaque tâche et rapportent ça au volume d’ouvrage réalisé lors de l’analyse. D’autres préfèrent raisonner sur la globalité du chantier et diviser le cumul d’heures de travail du grutier par la quantité globale d’ouvrages afin d’avoir un TU global. Libre à vous de retenir la méthode que vous voulez, mais gardez en tête que la fiabilité est le maître mot.

On joue sur des temps unitaires à 4 ou 5 décimales ! Passer de 0.0124hG/m² à 0.0141hG/m² peut sembler anodin, mais représente une variation de 14%, soit une heure de plus par journée de 7h.

Les conséquences d’une erreur

Cas n°1 : La sous-estimation de la charge de grue

Vous avez pris le pari d’installer 4 grues, pour une amplitude de travail de 7h/jour et 5 jours/semaine, avec 80 ouvriers.

Vous avez sous- estimé votre charge de grue de 25%. Le chantier a alors 3 solutions :

  1. ajouter une grue : 4 grues * 1.25 = 5grues
  2. augmenter l’amplitude de travail des 80 ouvriers + l’encadrement : 7h/jr * 1.25 = 8.75h/jr
  3. retarder la livraison de l’ouvrage.

La solution 1 engendre au minimum les surcoûts suivants :

  • le montage d’une grue supplémentaire
  • la location mensuelle d’une grue supplémentaire
  • le démontage d’une grue supplémentaire
  • la rémunération d’un grutier supplémentaire

La solution 2 engendre au minimum les surcoûts suivants :

  • la rémunération des heures supplémentaires des 80 ouvriers
  • la rémunération des heures supplémentaires de l’encadrement (si payé à l‘heure)
  • la rémunération des heures supplémentaires des grutiers

La solution 3 engendre au minimum les surcoûts suivants :

  • les indemnités de retard dues au client
  • l’allongement des durées de location de tous vos matériels
  • la rémunération des 80 ouvriers et grutiers sur la période de dépassement
  • la rémunération de l’encadrement sur la période de dépassement

Cas n°2 : La surestimation de la charge de grue

Vous avez surestimé la charge de travail de vos grues. Les conséquences peuvent être toutes autres.

Dans le pire des cas, vous perdez à l’appel d’offre car votre offre était trop chère du fait des frais de chantier trop importants.

Dans les autres cas, vous obtenez le chantier, les équipes travaux vont alors se rendre compte à un moment donné de votre erreur. Pour eux les conséquences sont très bonnes et ils peuvent espérer gagner sur :

  • le nombre de grues à installer et le coût correspondant
  • le nombre d’ouvrier et l’amplitude de travail
  • la durée du planning

A défaut de s’en rendre compte, le chantier payera un grutier qui s’ennuie et une grue qui n’est pas rentabilisée…

  • Pas assez de prudence = Pertes financières importantes
  • Trop de prudence = Affaire non décrochée

A vous de faire les bons choix et de prendre la pleine mesure de leur impact.


L’équilibre des amplitudes

L’expression « saturation de grue » prend alors tout son sens :

Un chantier optimal est donc un chantier où la grue est correctement saturée :

La charge de travail est telle que :

  • la grue n’est jamais inoccupée,
  • la grue n’est jamais sur-occupée

L’équilibre doit être parfait entre le temps de travail journalier des ouvriers et le temps de travail de la grue.

C’est pour cette raison qu’il arrive de décaler des équipes (cf. article sur Le Planning), afin de rétablir cet équilibre.

Ordres de grandeur

Pour vérifier que votre charge de grue est cohérente, voici quelques ordres de grandeur de cadences à respecter pour que votre grue soit saturée.

Pour un chantier de logement, structure béton traditionnelle voiles/dalles coulés en place :

  • voiles : 25 à 30ml/jour sur une hauteur courante (2.50 à 2.80m)
  • plancher haut : 50 à 60 m²/jour

Ces cadences permettent généralement de rester sur une journée de 7h.

Tutoriel vidéo complet

Conclusion

Travaillez vos charges de grue et vous pourrez aborder avec sérénité vos prochains dossiers. Basez-vous sur l’expérience de vos équipes travaux et vos propres observations pour vous construire une base de temps unitaires fiable et fournie.

Par Clément VALENTE

Expert en construction numérique

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