Le planning

Le planning est sûrement un des seuls documents de chantier qui concerne absolument tout le monde, du client à l’entreprise, et à tous les niveaux de responsabilité. Chaque intervenant a besoin de connaître à l’avance et aussi précisément que possible le déroulement du chantier, car il a de grandes répercutions financières.

Côté maître d’ouvrage, il conditionnera les déblocages de fonds auprès de la banque et donc le montant des intérêts intercalaires. Si les biens sont destinés à la revente, les acquéreurs sont également liés à leur banque par ce planning.

Côté maîtrise d’œuvre, ce document servira de « partition » pour organiser l’intervention de chaque entreprise. Il servira également de référence pour évaluer le retard des entreprises et leur imputer d’éventuelles indemnités.

Côté entreprise, il est dans un premier temps indispensable pour chiffrer les frais de chantier (matériel, bungalows, grue, chef de chantier, etc.) et, de ce fait,  essentiel pour remettre une offre de prix cohérente. En exécution, il conditionnera les dates d’affectation des ouvriers et donc le nombre d’heures consommées pour l’opération. Il permettra de planifier l’organisation des autres entreprises et sous-traitants, les locations de matériel, etc.

Je tiens à préciser qu’il n’existe par un mais plusieurs plannings pour chaque opération, avec une granularité et une finalité différente. Chaque entreprise aura besoin de son propre planning interne très détaillé pour organiser la production au quotidien, mais devra également veiller à inscrire son intervention en respectant le cadre imposé par le planning tous corps d’état dont la finalité est de veiller au fonctionnement du chantier à l’échelle globale.

Le présent article centre le propos sur la création et l’optimisation d’un planning interne visant à optimiser la production à l’échelle d’une entreprise. Vous trouverez un chapitre dédié au  Lean dans mon livre Préparer un Chantier de Bâtiment qui vous sensibilisera sur l’Intérêt d’intégrer les interactions avec les autres corps d’état dans votre réflexion.

A chaque étape son planning

De nombreuses appellations existent. Je vous indique ici celles que j’emploie.

En phase DCE, on parlera généralement de Planning Enveloppe. Il sert à indiquer à chaque entreprise répondant au DCE les bornes qui lui sont imposées pour réaliser les travaux.

En phase étude de prix, on parlera de Planning Prévisionnel d’Exécution. Remis avec l’offre de prix, il permet de montrer au client que l’entreprise a soigneusement réfléchi à la planification du projet et permet de mettre l’accent sur certaines difficultés ou incohérences dans le planning enveloppe.

En phase EXE, on dissocie parfois le Planning Objectif et le Planning Client. Le premier  correspond au planning le plus tendu que devra essayer de respecter l’encadrement de chantier, et a donc une vocation strictement interne à l’entreprise. Le second quant à lui est un planning plus souple qui permet de prendre en compte des aléas et retards éventuels.

Cette dualité permet de juger l’acceptabilité d’un retard :

  • être en retard sur le planning objectif mais pas sur le planning client est acceptable : vos engagements auprès du client sont encore respectés mais cette prise de retard sur vos objectifs internes doit vous alerter.
  • être en retard sur les deux plannings n’est pas admissible : vos engagements auprès du client ne sont pas respectés.

Construire un planning

Le diagramme de Gantt

Il existe plusieurs types de représentation graphique pour un planning, mais une seule est vraiment utilisée dans le BTP : le diagramme de Gantt.

Il s’agit d’un graphique à une seule dimension : le temps. Un calendrier est donc placé en ordonnée (une barre chronologique) et une liste de tâches est placée dans une colonne à gauche. En face de chaque ligne, une barre est dessinée. Placée sous la barre chronologique, celle-ci représente le période du calendrier durant laquelle cette tâche est appliquée.

Les logiciels

Il existe de nombreux logiciels permettant la construction de ces diagrammes (PSN, MS Project, etc.). Quel est le meilleur logiciel ? Au vue des besoins de notre industrie, j’aurais tendance à dire qu’il suffit d’avoir un logiciel assez généraliste qui permette :

  • de gérer les enchainements de tâches
  • de gérer les ressources affectées aux tâches
  • de gérer certaines formules de calcul

Le plan

Le plan doit être assez détaillé pour que l’ensemble des prestations qui vous incombent y soient visibles. Aussi, dans un premier temps, il est judicieux d’utiliser votre Cahier des Clauses Techniques Particulières (CCTP). Ensuite, vous vous apercevrez que certains postes du CCTP sont  trop généralistes et que les travaux correspondant s’effectuent en plusieurs phases. Vous créerez donc une décomposition de ce poste afin d’avoir une barre par phase.

Les logiciels de planification gèrent très bien l’indentation des tâches. Celle-ci doit aller du plus général au plus détaillé. Par exemple :

  1. Bâtiment A
    1. Etage 1
      1. Tâche 1
      2. Tâche 2
    2. Etage 2
      1. Tache 1
      2. Tache 2

Les durées de tâches

Dans un premier temps, vous utiliserez le Devis Quantitatif Estimatif (DQE) qui quantifie l’ensemble des ouvrages à votre charge. Au moyen des cadences habituelles de votre entreprise, vous en déduirez une durée et l’appliquerez à votre tâche.

Tout comme avec le CCTP, vous vous rendrez vite compte que la décomposition de certains postes n’est pas suffisante. Vous ferez donc vos propres métrés opérationnels pour ces postes là et appliquerez la bonne durée aux tâches concernées.

Les liaisons de tâches

Les logiciels de planification gèrent l’interdépendance des tâches. Généralement, 4 types de liaisons existent :

  • Fin à Fin (FF)
  • Fin à Début (FD)
  • Début à Fin (DF)
  • Début à Début (DD)

Il est possible de compléter ces liaisons par un décalage d’une durée donnée. Exemple FD + 5 jours.

Attention : les liaisons de tâches doivent absolument être logiques ! Il doit exister un lien concret entre deux postes (fin d’une dalle pour attaquer les voiles du dessus par exemple). Votre planning va évoluer, si des liaisons sont en trop ou d’autres manquantes, c’est la logique même de votre planning qui va être détruite ! N’hésitez pas à cumuler plusieurs liaisons si cela est nécessaire.

Les ressources

L’utilisation de celles-ci est très différente selon les logiciels mais l’objectif reste le même : affecter des ressources humaines ou matérielles aux différentes tâches afin d’obtenir le cumul de chaque ressource par date du projet. On matérialise généralement ces données sous la forme d’un graphique avec en X le calendrier et en Y le cumul des ressources. Le mieux est de vous référer à l’aide du logiciel employé.

Je vous recommande de lire mon article dédié au calcul et à l’optimisation des ressources humaines et matérielle

Procédure pour optimiser son planning

Nous avons vu comment bâtir le squelette de votre planning. Désormais, lorsque vous modifiez la durée d’une tâche, les tâches qui lui sont liées sont également modifiées.

Une question qui revient souvent est « comment calculer la durée d’une tâche ? » ou parfois « comment calculer la durée d’un cycle de réalisation d’un étage courant ? ».

Première étape : vous êtes le Roi du Monde !

A ce stade, considérez que c’est vous le Roi, pas le client (profitez, ça ne durera pas). Vous travaillez à votre rythme, et qu’importe la date à laquelle vous terminerez le chantier (oui oui, vous avez bien lu !).

Définissez des « cadences de base » qui vous permettent d’équilibrer vos équipes et la charge de travail. Par exemple : 25ml de murs par jour + 50m² de plancher.

Vous calculerez la durée théorique de chaque tâche (arrondie en nombre entier de jours) au moyen de la formule :

Durée (jours) = Quantité (unité) / Cadence (unités/jour)

En procédant ainsi pour toutes les tâches, vous appliquez des cadences parfaitement homogènes sur toute la durée de votre chantier, ce qui a pour effet de « lisser » les besoins en matériel et en ouvriers, mais également de lisser la charge de travail de la grue. Ce lissage est extrêmement important et constitue la principale source d’économie que l’on peut attendre du planning.

L’histogramme présent dans le chapitre « Les cycles de réalisation » au paragraphe « Le lissage des cadences » illustre parfaitement ce phénomène et vous permettra de comprendre en quoi le lissage engendre des économies budgétaires.

Deuxième étape : Retour à la réalité…

Cessons de fantasmer : le client est Roi, et le sera toujours. Si le client veut, le client a.

Le résultat de la première étape est un planning lissé, mais dont l’échéance (date de fin de la dernière tâche) ne correspond pas à la date demandée par le client. Il va donc falloir maintenant « comprimer » ou « dilater » votre planning pour vous caler sur la durée du planning « enveloppe » qui est donné dans le DCE.

Exemple :
  • Planning « roi du monde » de l’étape 1 → durée totale de chantier = 100 jours
  • Planning « enveloppe » du client → durée accordée pour le chantier = 70 jours
  • Vous allez devoir comprimer votre planning de 30%, c’est à dire recalculer la durée de chaque tâche en lui appliquant un facteur de 0,7 et en arrondissant en nombre de jours entiers le plus proche. Les cadences restent donc homogènes mais sont majorées de 30%

Les pièges à absolument éviter !

Les jours fériés

En France, 11 jours fériés par an = 3% du temps de travail annuel et, en cas ne non prise en compte dans votre planning, potentiellement autant d’indemnités de retard !

Vérifiez que ceux-ci sont bien comptés comme chômés dans votre logiciel.

Les congés

Votre entreprise ferme 2 semaines en août ou fait un des ponts du mois de mai ? Pensez à rendre ces jours chômés…

Le temps de travail

Le temps de travail doit bien évidemment être configuré dans votre logiciel après mûre réflexion. Votre chantier travaillera t’il 5 ou 6 jours par semaine ? Combien d’heures par jour ? Un chantier qui travaille 5 jours alors que le planning était prévu sur 6 jours aura 20% de retard !

Les liaisons de tâches

Avant toute diffusion, vérifiez à nouveau la cohérence de vos enchainements de tâches. Une incohérence à ce niveau là vous fera perdre toute crédibilité…

Planification des travaux répétitifs

Au-delà du planning général de chantier que nous venons de voir, penchons-nous maintenant sur un type de planning un peu particulier. Plus qu’un planning, il s’agit d’une méthode visant organiser la production d’éléments répétitifs en liants 3 notions :

  1. la cadence de fabrication,
  2. la cadence de pose,
  3. la quantité stockée.

Il s’agit par exemple d’établir un planning de préfabrication d’éléments en béton armé sur un chantier.

Illustrons le propos par un exemple très concret :

  • Vous préparez un chantier de bâtiment industriel constitué d’une poutraison préfabriquée sur site, au sol, puis posée par des grues mobiles,
  • Vos équipes de préfabrication ont une cadence de 8 poutres par jour,
  • Vos équipes de pose ont une cadence de 6 poutres par jour,
  • Vous avez un total de 96 poutres à préfabriquer et poser,
  • Une poutre ne peut être posée que 2 jours après sa préfabrication.

Représentons cela sous une forme graphique.

Représentation graphique de la panification de travaux répétitifs

Ce graphique superpose les 3 notions précédentes sous forme de courbes :

  • la courbe bleu représente le cumul du nombre d’éléments préfabriqués,
  • la courbe orange représente le cumul des poutres posées, et démarre donc 2 jours après le début de la préfabrication,
  • la courbe verte représente le résultat de la soustraction de bleu – orange

Conclusion

Le planning est le système nerveux du chantier. Sans celui-ci, rien ne fonctionnera comme prévu. Il ordonnance l’intervention des entreprises et permet d’anticiper la date de fin des travaux.

Vous devez soigner ce document, tout en restant conscient qu’un planning ne pourra jamais être valide si toutes les étapes du processus de la préparation de chantier n’ont pas été respectées.

Par Clément VALENTE

Expert en construction numérique

5 commentaires

  1. Bonjour
    Impeccable , on peut écrire (hier , non)
    Je vous remercie pour votre réponse
    Je suis aller sur Gannter et difficile de telecharger.
    Pour Mac , quel logiciel payant ou non svp
    l’idéal serait avec un fond déja prêt et « esthétique »
    c’est pour un centre commercial de plain pied (poteau/poutre/bardage)avec supermarché

    merci de votre réponse

    1. Je ne bosse pas sur Mac, mais il semble que les suites logicielles existantes soient les mêmes. Gantter existe en version Cloud avec Google Drive, sans besoin de le télécharger. C’est vraiment pratique !
      Pour le fond « esthétique », c’est très subjectif… Personne ne sera en mesure de vous donner exactement ce que vous attendez… Il vous reviendra de créer votre mise en page, dans la limite de ce que permet chaque logiciel.

  2. Bonjour
    Avec quel logiciel faites vous la présentation graphique animée de la vidéo « faire un planning avec MS Project » ? C’est parfait pour une présentation à un client

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